Célébrités à Saissac
MAISTRE
Par le Dr Jean MICHEL
La famille Maistre s'installe à Saissac par le mariage de Jules Maistre de Villeneuvette avec Marie fille d'Edouard Bosc . Jules Maistre appartenait a une famille de drapiers qui possédait la manufacture de Villeneuvette depuis 1803. Ils eurent 5 enfants, Claire, Edouard, Euphémie, Casimir et Paul.
L’ancienne cité industrielle et autonome de Villeneuvette de Clermont fut fondée sous l’impulsion de Colbert en 1677.
Fontaines, aqueduc, canaux déversoirs en cascades, bassins rappellent le Roi-Soleil. Dont une petite place en carré porte le nom. Rien n’y manquait : l’église, l’auberge pour les inspecteurs des draps et les négociants de passage, la glacière sous sa coupole ; les habitations des contre-maîtres et commis dans la grand’rue, les logements rue Bert pour foulonner, tondeurs, pareurs, encoleurs et tisserands. La cité du travail grâce aux prés, vignes, oliviers et champs l’entourant se suffisait à elle-même.
Ce fut le dernier établissement de ce type à survivre, après une réussite qui dura jusqu’aux années 1950.
Paul Maistre va résider à Escourrou, il s'occupera aussi de la manufacture "Jules Maistre et fils" à Villeneuvette . Puis a la mort de Jules Maistre son père en 1909, il va avec son frère Casimir devenir gérant de la société "Les fils de Jules Maistre", transformée enfin en société "Maistre et Cie". Paul Maistre va tomber héroïquement à Verdun en 1916.
Casimir Maistre
Etait donc le petit fils d'Edouard Bosc .Il est très jeune passionné par les explorations et participe ainsi en 1889 avec le docteur Catat à l'exploration d'une partie inconnue de Madagascar cinq ans avant l'occupation de l'île par les troupes françaises.
Casimir Maistre effectue son premier voyage avec le Docteur Catat à Madagascar.
Le compte rendu de ce voyage paraît dans « Le Tour du Monde de 1893. Voyage qui dure de 1889 à 1891.
C'est alors que le comité de l'Afrique Française le choisit pour prendre le commandement de la mission Congo Niger , il a alors 23 ans , c'était en 1892.
Cette mission avait pour but de relier les établissements du Congo et ceux du Soudan. C'était l'époque où les anglais envisageaient d'établir une ligne de chemin de fer entre le Cap et le Caire et les français entre Dakar , Brazzaville et l'Abyssinie et Djibouti .D'où la fameuse affaire de Fachoda et du commandant Marchand qui faillit se terminer tragiquement . Une première mission confiée au colonel Crampel venait d'échouer et avait vu la mort de son chef.
Léon , Joseph, Casimir Maistre prend le départ de Brazzaville avec sous ses ordres 5 européens et une escorte de 60 sénégalais et 120 porteurs. Il va falloir deux ans a Casimir pour parcourir un itinéraire de 5000 Km dont plus de 2000 à pieds dans des régions totalement inconnues.
De l'Oubangui a Garoua grâce à de patientes négociations menées avec les chefs régionaux , il réussit à obtenir des accords d'amitié qui ratifiés par le gouvernement et le parlement nous assurent une primauté sur l'Angleterre et l'Allemagne .Ces droits sont reconnus par la convention de Berlin en 1894.
Ces droits obtenus par la mission Maistre permettent en 1908 un arrangement avec l'Allemagne qui moyennant la cession d'une partie des territoires obtenus par Maistre évite une guerre et nous laisse les mains libres au Maroc.
Les documents scientifiques rapportés par Maistre et ses compagnons (Géologie, astronomie, hydrographie, levée de plans etc. ) Utilisés par les géographes français et étrangers , les nombreux congrès et conférences , donnent à Casimir Maistre une réputation internationale et lui valent de nombreuses distinctions , dont la légion d'honneur à 25 ans qui lui est remise par le ministre Delcassé.
Carte
exécutée d’après les documents de Casimir Maitre
Partis de l’Oubangui,
poste de Kémo, passe chez les Ndris, échange de sang, en
guerre avec les Mandjas. Va chez les Arétous, puis chez les Saras,
dans les marais rencontre les musulmans du Baguirni. Passe chez les Toumoks
puis les Gaberis . Traversée du Logone. Séjour forcé chez les
Lakas, puis retour par la Bénoué, Yola, Ibi et le fleuve Niger.
La paix de Casimir
avec les Mandjias 1892
Attaque du camp par les Mandjas
Maistreville
Il décide en 1950 de revenir a ses souvenirs et note ses mémoires. Il a toujours été en relations d'amitié avec Brazza et Lyautey , ainsi qu'avec les académies de sciences coloniales. Dans sa maison de Montpellier où il se retire , il reste a l'écoute des événements , toujours aussi alerte d'esprit. En 1935 à l'initiative du général Malafosse (fils d'un contremaître de Villeneuvette) Casimir Maistre est nommé sur intervention de Lyautey officier de la légion d'honneur En 1937 le haut-commissaire Boisson inaugure à Garoua au Cameroum un monument rappelant la jonction des missions Maistre et Mizon venues à la rencontre l'une de l'autre .En 1947 un poste stratégique du Tchad est baptisé Maistreville par décret du gouvernement français .Le monument de Garoua a été détruit et seule une plaque de bronze a pu être sauvée grâce à la présence d'esprit de notre ambassadeur .Maistreville se nomme désormais Kelo et sert de dépôt aux "Médecins sans frontières"
Casimir est mort en 1956 à Paris renversé par un véhicule conduit par un noir.
Le drapeau tricolore qui porté par un tirailleur sénégalais a parcouru 5000 Km en tête de la colonne est rentré en France avec de très nombreux objets , armes, ivoires, bracelets et les carnets de notes journalières tachés et délavés par les bourrasques et le soleil. Ces notes ont permis au service géographique de l'armée de dresser une carte exacte de l'itinéraire Congo-Niger.
Ces souvenirs précieux sont toujours entre les mains des héritiers directs de Casimir Maistre.
Casimir Maistre directeur de la Manufacture
Et voici qu'en 1895 Casimir disparaît de la scène en pleine notoriété , il va désormais pour obéir aux ordres de son père se consacrer à la gestion des affaires familiales jusqu'en 1950 ou il reviendra à ses souvenirs .
Pour obéir a son père Jules Maistre-Bosc qui l'appelle a l'aide, Casimir abandonne sa vocation. Avec son frère Paul il devient a la mort de son père en 1909 gérant de la société "Les fils de Jules Maistre" transformé en société "Maistre & Cie "
Les deux guerres mondiales allaient étoffer une activité s'effilochant après 1902 ou l'on recensait 300 habitants .Jusqu'en 1939 on y tissa du drap pour la marine et jusqu'en 1943 pour les fantassins. Dès lors la marche devint de plus en plus claudiquante.
Casimir jusqu'en 1950 dirige la manufacture , aidé de son frère Paul (héroïquement tombé à Verdun en 1916) et de son neveu Jean Maistre lui aussi combattant gravement blessé .Casimir, aux qualités de meneur d'hommes, dirige pendant près d'un demi-siècle (1909 1950) l'entreprise où l'on apprenait à lire , où l'on vivait et on mourait. On y partageait le travail, le gîte, les jardins, les distractions et les fêtes.
Une vie communautaire dans une étonnante abbaye ouvrière ayant élevé le travail en arc de triomphe au dessus de la lourde porte. Villeneuvette eût ses chapelles. Comme le veut le dicton "La laine est catholique, la soie protestante" les gens de messe étaient les plus nombreux. Mais ils y voisinaient en bonne intelligence avec les protestants hollandais ou du R P R (Religion prétendue réformée) . Et c'est là que naquit Pierre Jacques Astruc qui introduisit la franc-maçonnerie en Languedoc.