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Les 3 légendes du Cabardès - Le Chandelier Sacré

Par Le 15/09/2014

 

LE CHANDELIER SACRE

 Menorah arc titus rome

 

                  Les Rois Wisigoths possédaient un trésor fabuleux, qu'ils

                  avaient amassé, de pillages en pillages, à travers toute

                  l'Europe. Le joyau en était le célèbre chandelier d'or pur, à

                  sept branches, enrichi de pierres précieuses, provenant du

                  Temple de Jérusalem, dont an disait que celui qui le profanait

                  était foudroyé sur l'instant.

                  Le Roi Alaric s'était installé à Toulouse, mais en 507, les

                  Francs, menés par Clovis s'ébranlent ; à la bataille de

                  Vouillé, Alaric est tué en combattant, et son armée décimée;

                  les Francs foncent sur Bordeaux et y passent l'hiver; au

                  printemps, Clovis reprend l'offensive, déborde Toulouse,

                  atteint Carcassonne, en 508.

                  Le trésor avait été replié rapidement de Toulouse à

                  Carcassonne ; mais l'escorte, surprise par l'avance franque,

                  dut se replier sur Saissac, ou elle enfouit le trésor, qui s'y

                  trouve encore malgré des recherches et fouilles nombreuses.

                  Ici s'arrête la tradition; qu'il soit permit de laisser

                  chanter la légende !

                  Les Francs pénétraient déjà dans les faubourgs de Toulouse :

                  l'affolement régnait; les seigneurs Wisigoths se préparaient

                  en toute hâte à se replier sur Carcassonne en bataillant pour

                  retarder l'avance ennemie; mais la famille royale, Théodegothe

                  la jeune épouse du défunt roi et Amalric, son fils, espoir de

                  la dynastie, bien qu'il n'eut que 4 ans; était encore dans

                  Toulouse; ils devaient partir sans retard à Carcassonne; en

même temps, il fallait escorter le trésor, composé de dizaines

de coffres, long convoi tiré par des bœufs.

                  Le jeune seigneur Euric réclama cette mission et l'obtint;

                  accompagné d'une légère escorte, il s'échappa de justesse de

                  Toulouse, laissant filer le convoi, pendant qu'il amusait les

                  ennemis en guerroyant. Puis, confiant dans son avance, et

                  escomptant que les Francs s'attarderaient quelques jours à

                  Toulouse, il régla la marche du lent convoi, et multiplia les

                  reconnaissances, prêt à s'échapper dans les bois ou par les

                  chemins boueux du Lauragais, à la moindre alerte.

                  Mais au relais d’Elusio, Euric appris que des francs, venant

                  d’Albi s’étaient déjà répandu sur la route de Carcassonne,

                  vers Bram, alors appelé Hébromagnus.

                  Il n’était plus question de suivre la grande route de

                  Carcassonne ; il décida de se jeter dans la montagne et

                  d’essayer de gagner, par des chemins détournés, par Issel,

                  Verdun et la forêt de Bruniquel, le petit Castellum de

                  Saxacum, que l'on nomme aujourd'hui Saissac. Il connaissait

                  bien cette région, qu'il avait maintes fois parcouru avec ses

                  compagnons dans leurs chasses à l'ours : ce n'étaient que

                  forêts profondes, que le printemps parait de muguet, mais il

                  savait y trouver un asile sûr et des chemins praticables.

                  Enfin, ils furent en vue de Saissac et les lourds chariots

                  s'engouffrèrent dans le « castrum ". Euric, comprenant qu'il

                  n'avait guère de chance de transporter les caisses à

                  Carcassonne avant que le pays ne soit débarrassé de l'ennemi,

                  décida d'enfouir le trésor à l'abri des souterrains du château.

                  La Reine n'avait pas été insensible au charme du jeune

                  seigneur, à la délicatesse de ses manières, ainsi qu'à son

                  courage et à son sang-froid; elle approuva le projet de cacher

                  le trésor, jusqu'à des jours meilleurs, mais manifesta le

                  désir d'assister avec Euric à l'enfouissement.

                  Lorsque les caisses furent déposés dans les profondeurs des

                  salles souterraines, ils restèrent seuls :

                  - Ah ! Euric ! Je voudrais tant me parer une dernière fois de

                  tous ces bijoux royaux....

                  Et ce fut un spectacle féerique; la reine chargea ses bras de

                  bracelets étincelants, des diamants brillèrent à sa chevelure

                  d'or, d'énormes rubis attachés aux lobes délicats de ses oreilles

                  firent ressortir l'exquise fraîcheur de ses lèvres; l'éclat

                  rougeoyant et changeant des torches faisait varier les teintes

                  et les éclats de ces bijoux splendides; l'odeur de la résine

                  qui embaumait la salle exaltait leurs esprits :

                  - Ah ! Euric ! Suis-je belle? Suis-je belle, Euric ?

                  Elle n'avait pas de miroir, mais l'adoration qu'elle lisait

                  dans les yeux bleus d'Euric agenouillé devant elle, reflétait

                  sa beauté, mieux que le cristal le plus pur.

                  Puis, fouillant à pleines mains dans les coffres massifs, elle

                  -jeta pêle-mêle, sur le sol, au gré de son caprice, ors,

                  bijoux, argents, monnaies scintillantes; elle sortit encore

                  les soixante calices d'or pur massif, les soixante patènes et

                  une multitude de croix massives, qu'elle disposa sur les

                  coffres ou sur l'aspérité du mur.

                  Ah ! Ma Reine ! Ah ! Ma déesse !

                  Et, lui aussi, dans l'exaltation de son admiration, pris par

                  cette étrange fièvre de l'or, enivré par la beauté de la

                  reine, exhaussée encore par la splendeur des bijoux et des

                  éclairages, il saisit au fond d'un coffre le fabuleux

                  chandelier à sept branches de Jérusalem luisant dans

                  l'obscurité par l'éclat de mille pierres précieuses; il oublia

                  la malédiction qui s'attachait à ce chef-d’œuvre

                  d'orfèvrerie, tout à son amour, tout à l'idole qui s'offrait à

                  lui, parée comme une déesse: Il posa le chandelier devant son

                  amante, et se prosterna à ses pieds...

                  Nul ne les revit jamais; les hommes de l'escorte, inquiets de

                  leur absence trouvèrent le souterrain fermé par un éboulement;

                  ils quittèrent Saissac emmenant le petit roi Amalric, qui put

                  trouver abri à Carcassonne.

                  La campagne s'épanouissait dans le printemps, et la forêt se

                  constellait de fleurs. Dans le plus somptueux des décors.

                  Théodegothe et Euric agonisaient dans la splendeur de leur

                  amour...

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